Françoise Tomeno
23 avril 2012
C’est sur ma route. Je passe par
là presque toutes les semaines. Et comme je suis toujours en avance, je
m’arrête chez Isa. Ce n’est pas vraiment un bistrot, chez Isa. Tabac presse, et
on peut y boire un café. Isa, elle est toujours bien mise. Elle est
courageuse,. Elle est seule à assurer, elle ne peut pas se permettre de fermer
plus d’une demi-journée par semaine. Parfois elle râle un peu, quand la vie ne
va vraiment pas comme elle aimerait, que les clients sont à peine polis.
Depuis quelques mois, quand je
passe chez Isa, il y a une jeune maman avec son petit, qui grandit tout
doucement. Ce petit m’a toujours sidérée par son humeur toujours tranquille et
souriante. Un bébé qui va bien.
Ce jour-là, il chichougne, ça ne
va pas comme d’habitude. Nous papotons comme souvent, et la maman s’inquiète de
ce changement : le petit ne
supporte plus qu’elle s’éloigne de lui. Hum… Je lui demande l’âge du petit, à
peine 9 mois.
Je fais ma psychologue ou je la
fais pas ?
Allez, j’y vais. Je dis à cette
maman que c’est peut-être tout simplement qu’il arrive à l’âge où on réalise
qu’on perd un peu sa maman quand elle s’éloigne, et qu’on n’est pas sûr qu’elle
revienne. A lors la vie devient un petit drame provisoire, puisqu’elle
revient (en principe !...). « Pourtant, il a été attendu, celui
là… » dit-elle.
Entre temps il s’est apaisé, et
est à nouveau tranquille et souriant.
Alors elle me raconte : elle
n’avait pas vraiment souhaité cet
enfant, il lui était arrivé comme ça ; le papa, qui, lui, souhaitait un
enfant, était parti avant la naissance. Et tout doucement, au fur et à mesure
que la grossesse avançait, il était là, bien en elle, bien à elle, son petit, adopté, attendu, bien attendu.
Et puis il y avait eu Isa, la
première à venir les voir, elle et son petit, à la maternité. Isa prend alors
le petit dans ses bras, et je ne vous dis pas, ou plutôt si, je vous le dis,
l’échange de regards, magnifique, entre Isa et le petit.
Joli ! Bien porté tu es,
petit, bien portant tu seras…. ?