Estaminet Tomeno Mercier

Estaminet Tomeno Mercier

01 mars 2016

Un café pour le philosophe

Françoise Tomeno
1er mars 2016

C'est Mahmoud. Mahmoud qui a retrouvé son survêtement mal ajusté et la courbure qui  le fait foncer droit dans sa vie, et droit dans celle des autres par la même occasion. Mahmoud qui, mystérieusement, en tout cas pour moi, s'était redressé pendant toute une période, avait la posture et le regard qui affrontaient le monde.

Il rentre dans le bistrot et fonce vers le présentoir des jeux sans regarder rien d'autre. 

Un jeune homme que j'ai déjà vu ici, et qui porte dans ses yeux le même arrière-pays que Mahmoud, entre et va vers le comptoir où officient Marlène et Georges.

Mahmoud, lui, s'avance vers l'autre comptoir. C'est le comptoir des jeux, c'est le comptoir  derrière lequel se tient le patron.  Et il tient bien ça, le patron (je ne sais même pas comment il s'appelle, le patron. On ne l'appelle pas de loin, on vient le voir directement à son comptoir).

Mahmoud, semblant ne s'adresser à personne en particulier, toujours la tête droit devant lui, annonce: "Un café pour le philosophe".

Le philosophe, c'est le jeune homme qui vient d'entrer. J'avais déjà entendu Mahmoud le qualifier ainsi. 

Mahmoud, avec cette espèce de fausse innocence qu'il semble parfois afficher, est celui qui dit certaines vérités dans ce bistrot. Tout comme il qualifie ce jeune homme de philosophe, il lui arrive, et c'est bien le seul, de donner des nouvelles du monde, des conflits du monde, des paysages du monde qu'il et qu'ils connaissent bien. Et il n'épargne ni les tyrans ni les  fous de dieux.

Mahmoud, le crieur de vérité.