Estaminet Tomeno Mercier

Estaminet Tomeno Mercier

12 mai 2012

UN SQUIGGLE AU COMPTOIR

Ou « « du Foyer de l’Enfance à la Brioche Perdue ».

Françoise Tomeno
12 mai 2012

La petite Léa vient s’installer sur la banquette devant une table libre. Elle doit avoir dans les huit ans. Ses parents sont en terrasse. Pourquoi vient-elle là ? Pour se mettre à l’abri du soleil ? À l’abri des grandes personnes ?

Elle reste là un bon moment, regardant à droite à gauche, en particulier les affiches sur la vitrine, qu’elle doit déchiffrer à l’envers. Elle ne semble pas s’ennuyer.

Arrive Églantine [1], une jeune femme. Léa et elle visiblement se connaissent. Léa va rejoindre Églantine qui s’est installée au bar, elles papotent toutes les deux. Et puis Églantine propose à Léa de dessiner, ce fameux jeu de dessin aux formules variables, qu’a utilisé un de mes psychanalystes préférés, Winnicott, le jeu du « squiggle ». Dans la forme adoptée par Léa et Églantine, une commence un dessin (un gribouillis ?), l’autre poursuit, et ainsi de suite. Et ça sur un des sets en papier kraft du bistrot.

Pendant ce temps, juste derrière, à une autre table, j’entends une jeune fille parler de son travail dans un foyer qui accueille des enfants. Un peu plus tard, cette même jeune fille hésite sur les desserts. Alphonse les lui a énumérés, et j’ai entendu qu’il y avait de la brioche perdue. Vous ne voyez pas ce que c’est ? Vous souvenez-vous du pain perdu que faisaient nos mamans ? C’était par souci d’économie. On ne perdait rien, justement. Le pain qui commençait à rassir était trempé dans un mélange de lait et d’œuf avec un peu de sucre, et passé à la poêle. Un régal.

Et bien la brioche perdue, c’est encore meilleur. Même formule, sauf que le pain est remplacé par de la brioche, et le sucre par du caramel au beurre salé. Hum !.....

Je dis à la jeune femme hésitante que c’en est à tomber par terre tellement c’est bon. Va pour une brioche perdue.

Ce bistrot est un véritable foyer pour l’enfance. L’enfance des enfants qui peuvent y dessiner tranquillement sur les sets en papier kraft, et qui ont toujours à leur disposition des crayons, des bouquins. Foyer pour nos enfance rêveuses et à peine perdues puisque retrouvées ici, au travers de la brioche perdue, et de cette invention qui s’appelle « le frigo du livr’échange », dans lequel nous pouvons  nous aussi trouver, tout comme les enfants, de la lecture.


Et qu’est-ce que je fais, moi, en ce moment, sur le côté droit du set en papier kraft qui est devant moi ? Je prends des notes pour mes petites chroniques du jour.